Pour sa treizième édition, le festival qui se déroulera du 7 au 10 novembre dans la ville d’Utrecht aux Pays-Bas, invite notamment la légende de l’ethio groove Ayalew Mesfin pour une performance exceptionnelle en Europe.
En plus de proposer une programmation des plus éclectiques en Europe, le festival se distingue en offrant l’opportunité à des artistes de faire leur propre programmation, ce qui participe à la diversité des artistes invités et contribue à élargir les horizons sonores. En avril dernier, le Le Guess Who? dévoilait au titre d’artiste-curateur la chanteuse malienne Fatoumata Diawara, elle-même programmée dans le cadre du festival. Sont également invités à faire leur programmation : la Norvégienne Jenny Hval, le producteur électronique The Bug, le New-Yorkais Patrick Higgins et Moon Duo.
Pour cette nouvelle édition, Le Guess Who? célèbre le grand retour sur scène de Ayalew Mesfin, une des légendes de la musique éthiopienne des années 70. Comme beaucoup de ses contemporains, il eut maille à partir avec le DERG, la junte militaire qui en 1974 déposa l’empereur Hailé Sélassié. Paradoxalement, le début de cette nouvelle ère fut sa période la plus productive, accompagné par son Black Lion Band. Mais l’étau allait se resserrer, d’autant que le chanteur, sous couvert de chansons d’amour, pratiquait le langage à double sens qui, pour qui savait le décrypter, traitait des problèmes sociaux du pays. Il alla même jusqu’à distribuer gratuitement 4000 cassettes qu’il avait enregistrées. Le coup de grâce, raconte-t-il, vint d’une dénonciation d’un de ses proches amis qui éventa son projet de partir l’étranger, comme tant d’autres musiciens éthiopiens à l’époque. Avec le recul, il s’estime heureux de n’avoir écopé que de trois mois de prison, mais dès sa sortie en 1978, et ce jusqu’à la fin du régime, il allait rester coincé en résidence surveillée, son matériel confisqué, et interdit de se produire ou d’enregistrer. Il dérogea souvent à la règle cependant, en gravant clandestinement quelques chansons dans le studio bricolé au fond de sa boutique de disque. En 1991, a la chute de Mengistu Haile Maryam, « Le Negus Rouge » qui dirigeait la junte, il reprit officiellement ses activités. Enfin, en 1998, il partit tenter sa chance aux États-Unis, mais comme il le confiait au site Vynil me, please en 2018 : “C’est regrettable, mais mes années passées aux États-Unis ont été un vide dans ma carrière musicale. Comme je le dis à mes amis musiciens, une fois que vous quittez le pays, votre vie musicale sera celle d’un poisson hors de l’eau ».
D’autant que les musiciens éthiopiens, qui se cherchent tous, sont disséminés aux quatre coins de ce pays-continent. Finalement, Ayalew a fini par poser ses bagages à Denver, Colorado. C’est là qu’il a rouvert son magasin de disque, baptisé du nom de celui qu’il tenait à Addis : Ayalew Music Shop.
L’année dernière le label Now Again Records ressortait son tout premier album, Hasabe, sorti 40 ans plus tôt, offrant une reconnaissance méritée à l’artiste. Et un tremplin pour retrouver la scène? C’est tout l’intérêt du show qu’il doit donner au festival Le Guess Who?.
Accompagné du groupe Debo, formé en 2006, dans le but de préserver l’esprit et le savoir-faire de l’âge d’or de la pop en Éthiopie, Ayalew Mesfin donnera son unique concert en Europe dans la ville d’Utrecht.
La liste des artistes dévoilés fait la part belle à l’Afrique, avec au programme, le groupe somalien Dur-Dur Band, le guitariste folk touareg Ahmed Ag Kaedy, le jazz cosmique d’Idris Ackamoor & The Pyramids, le génial batteur de Chicago Makaya McCraven, l’auteure-compositrice Mélissa Laveaux qui présentera son dernier album, Radyo Siwel, la collaboration avec le producteur techno Mark Ernestus et Ndagga Rhythm Force ou encore Gyedu-Blay Ambolley qui se produira avec le groupe His Sekondi.
Le Guess Who? 2019 se déroulera du 7 au 10 novembre à Utrecht, aux Pays-Bas. Les tickets jours et pass sont d’ores et déjà mis en vente. Pour plus d’informations, rendez-vous sur le site du festival.
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